Comptabilité de copropriété : plan comptable, budget et trésorerie 2025

Le cadre comptable obligatoire

Depuis 2007, la comptabilité des copropriétés est encadrée par un plan comptable spécifique et des obligations strictes de transparence. Le non-respect expose le syndic à des sanctions.

Le plan comptable de la copropriété

Un plan comptable unifié facilite la lecture et la comparaison.

Les comptes de charges (classe 6)

Les dépenses courantes sont classées : 60 - Achats et fournitures (eau, électricité, fioul), 61 - Services extérieurs (entretien, nettoyage, assurances), 62 - Autres services (honoraires syndic, frais bancaires), 64 - Charges de personnel (gardien, employé), 65 - Autres charges (impôts, taxes). Chaque compte comporte des sous-comptes détaillés.

Les comptes de produits (classe 7)

Les recettes de la copropriété : 70 - Appels de fonds pour charges courantes, 71 - Appels de fonds pour travaux, 75 - Autres produits de gestion (locations, antennes relais), 78 - Reprises sur provisions. Les appels de fonds constituent l'essentiel des produits.

Les comptes de trésorerie et bancaires

La séparation des comptes est obligatoire : compte bancaire principal copropriété, compte spécial travaux (si importants), compte personnel du syndic strictement séparé. Tout mélange est une faute grave pouvant entraîner révocation et poursuites.

Les comptes d'attente et de régularisation

Pour gérer les décalages : 47 - Compte transitoire copropriétaires, 49 - Dépréciation des comptes de tiers, 486 - Compte d'attente, 48 - Comptes de régularisation. Ces comptes doivent être soldés en fin d'exercice ou justifiés.

Le budget prévisionnel

Le budget est voté chaque année en assemblée générale.

La préparation du budget

Le syndic établit le budget prévisionnel : analyse des dépenses de l'année N-1, ajustement selon évolutions connues (hausse tarifs), anticipation des gros entretiens, provision pour impayés (3 à 5%), présentation en AG. Le budget est un outil de pilotage, pas un carcan.

Les postes obligatoires

Certaines dépenses doivent figurer : charges courantes d'entretien et fonctionnement, contrats pluriannuels (ascenseur, chauffage), honoraires du syndic, prime d'assurance de l'immeuble, provisions pour gros travaux (fonds travaux), charges de personnel. L'oubli d'un poste bloque les paiements.

Le vote et la modification

Le budget se vote à la majorité simple (article 24) : présentation détaillée par le syndic, questions et débat, vote poste par poste ou global, en cas de refus : ancien budget reconduit provisoirement. Des ajustements sont possibles en cours d'année si besoin imprévu.

Les appels de fonds trimestriels

Le budget est réparti en 4 provisions : chaque trimestre : 1/4 du budget annuel, appel au moins 1 mois avant échéance, paiement sous 30 jours après réception, relance si impayé, procédure de recouvrement si nécessaire. Les appels réguliers évitent tensions de trésorerie.

Les comptes annuels

À la clôture de l'exercice, des comptes détaillés sont produits.

Le compte de gestion générale

Il retrace toutes les opérations : recettes (appels de fonds) et dépenses réelles, solde final (excédent ou déficit), ventilation par catégorie de charges, comparaison budget / réalisé. Ce compte doit être approuvé en AG.

L'état financier après répartition

Il détaille la situation de chaque copropriétaire : appels de fonds payés, quote-part charges réelles selon tantièmes, avances ou dettes individuelles, régularisation (remboursement ou complément). Chaque copropriétaire reçoit son décompte individuel.

La balance générale des comptes

Document comptable technique listant : tous les comptes ouverts, soldes débiteurs et créditeurs, équilibre global des comptes. La balance permet de vérifier la cohérence comptable.

Les annexes obligatoires

Plusieurs documents accompagnent : état des travaux votés et réalisés, état des emprunts (si prêt collectif), créances et dettes envers tiers, engagements hors bilan (cautions, garanties), rapport de gestion du syndic. Ces annexes éclairent les comptes.

La gestion de la trésorerie

Piloter la trésorerie évite ruptures et optimise les placements.

Le suivi de trésorerie

Le syndic doit anticiper : tableau prévisionnel des encaissements et décaissements, identification des périodes tendues, anticipation des gros paiements (travaux, assurance), ajustement des appels de fonds si besoin. Un tableur ou logiciel spécialisé facilite ce suivi.

La gestion des impayés

Les créances copropriétaires pèsent sur la trésorerie : relance amiable dès 30 jours de retard, mise en demeure à 60 jours, procédure judiciaire si échec, privilège du syndicat sur le lot (garantie), information en AG des impayés. Un taux d'impayé supérieur à 5% est préoccupant.

Le placement des excédents

Si trésorerie excédentaire : compte rémunéré (livret A, compte à terme), OPCVM monétaires sécurisés, interdiction de placements risqués, autorisation AG pour certains placements, les intérêts bénéficient à la copropriété. Même modeste, le rendement réduit les charges.

La ligne de trésorerie

En cas de besoin ponctuel : découvert bancaire autorisé par AG, montant et durée limités, taux d'intérêt négocié, remboursement rapide dès rentrées. Évitez le découvert structurel (signe de mauvaise gestion).

Le fonds de travaux obligatoire

Depuis 2017, toute copropriété doit constituer un fonds.

Le principe

Provision annuelle minimale obligatoire : au moins 5% du budget prévisionnel charges courantes, versement sur compte séparé dédié, utilisation exclusive pour travaux, non restituable aux copropriétaires sortants. Ce fonds anticipe les gros travaux.

Les dispenses possibles

Certaines copropriétés sont dispensées : copropriété de moins de 10 ans, copropriété en difficulté (plan de sauvegarde), dispense votée en AG à l'unanimité, existence d'un plan pluriannuel de travaux voté. La dispense est rarement opportune.

L'utilisation du fonds

Le fonds finance les travaux : travaux de conservation de l'immeuble, travaux d'entretien importants, mise aux normes réglementaires, amélioration énergétique. Vote en AG pour décider de l'utilisation. Le solde doit rester au minimum réglementaire.

La comptabilisation

Le fonds travaux figure : au passif du bilan comme réserve, alimentation par appels de fonds spécifiques, utilisation en diminution de la réserve, suivi séparé des autres comptes. Transparence totale requise.

Les contrôles et la certification

Les comptes font l'objet de vérifications.

Le rôle du conseil syndical

Le conseil syndical vérifie : cohérence des comptes, respect du budget voté, justification des dépenses importantes, absence d'anomalies, relevé bancaire concordant. Le conseil syndical donne un avis sur les comptes présenté en AG.

L'expert-comptable

Dans les grandes copropriétés : l'AG peut décider de faire certifier les comptes, mission d'audit par expert-comptable, attestation de régularité et sincérité, coût : 2 000 à 8 000€ selon taille, obligatoire dans certaines collectivités territoriales. La certification rassure les copropriétaires.

Les contrôles de l'administration

La DGCCRF peut contrôler : conformité au plan comptable, transparence et sincérité, absence de surfacturation, respect obligations légales. Des sanctions administratives et pénales sont possibles en cas d'irrégularités graves.

La fiscalité de la copropriété

La copropriété a des obligations fiscales spécifiques.

La TVA

Le syndicat des copropriétaires n'est pas assujetti à la TVA : les charges sont TTC pour les copropriétaires, pas de récupération de TVA, exception : location de places de parking à des non-copropriétaires (TVA applicable). Le syndic gère cette complexité.

La taxe foncière

Chaque copropriétaire paie : la taxe foncière sur sa quote-part des parties communes, + la taxe foncière sur son lot privatif, le syndicat ne paie pas de taxe globale. Certains copropriétaires ignorent cette répartition.

La taxe sur les bureaux (Île-de-France)

Pour locaux professionnels en copropriété : taxe payée par l'occupant (propriétaire ou locataire), répartition selon surface, déclaration annuelle obligatoire. Le syndic informe sur les montants.

Le prélèvement à la source (employés)

Si la copropriété emploie un gardien : le syndicat est employeur, prélèvement à la source sur salaire, déclaration DSN mensuelle, versement à l'URSSAF. Le syndic gère ou délègue à expert-comptable.

Les outils informatiques

La digitalisation simplifie la comptabilité.

Les logiciels de gestion

Les logiciels dédiés automatisent : saisie des écritures comptables, édition des appels de fonds, suivi des paiements et relances, génération des comptes annuels, tableaux de bord et indicateurs. Exemples : Vilogi, Copsync, SyndicOS. Coût : 300 à 1 500€ par an.

La dématérialisation

Le zéro papier facilite : factures fournisseurs numérisées, archivage électronique sécurisé, accès copropriétaires à leurs comptes en ligne, signature électronique des PV, transmission automatique à l'expert-comptable. Gain de temps considérable.

Les extranet copropriétaires

Transparence et autonomie : chaque copropriétaire accède à son espace, consultation des appels de fonds et paiements, téléchargement des justificatifs, historique des charges, messagerie avec le syndic. Les copropriétaires apprécient cette transparence.

Les erreurs comptables fréquentes

Certaines fautes reviennent souvent.

La confusion des comptes

Erreur grave : mélanger trésorerie copropriété et syndic, imputer charge courante sur fonds travaux, oublier de provisionner gros entretiens. Ces erreurs faussent les comptes et peuvent constituer un abus de confiance.

Les provisions insuffisantes

Sous-estimer les charges futures : budget trop optimiste, pas de marge pour imprévus, travaux urgents non financés. Résultat : appels de fonds exceptionnels mal acceptés par les copropriétaires.

Le défaut de suivi

Ne pas actualiser régulièrement : attendre la fin d'année pour pointer, ignorer les dérives budgétaires, ne pas relancer les impayés rapidement. Un suivi mensuel évite les mauvaises surprises.

La transition comptable

Lors d'un changement de syndic, la passation est cruciale.

L'état des comptes au départ

Le syndic sortant transmet : balance des comptes arrêtée à date, liste des créances et dettes, relevés bancaires, factures en attente, contrats en cours, engagements pris. L'exhaustivité est impérative.

La vérification par le nouveau syndic

Le syndic entrant contrôle : cohérence des comptes transmis, pointage relevés bancaires, vérification créances (impayés réels ?), dettes justifiées, absence de détournement. Un audit contradictoire sécurise la transition.

La régularisation des anomalies

Si écarts constatés : mise en demeure syndic sortant d'expliquer, action en responsabilité si nécessaire, information AG des anomalies, régularisations comptables. L'assurance du syndic peut indemniser.

Les indicateurs financiers clés

Quelques ratios révèlent la santé de la copropriété.

Le taux d'impayés

Créances copropriétaires / budget annuel : moins de 5% : situation saine, 5 à 10% : vigilance requise, plus de 10% : copropriété en difficulté. Ce ratio est le premier signal d'alerte.

Le fonds de roulement

Trésorerie disponible / charges mensuelles moyennes : objectif : 3 à 6 mois de charges, moins de 2 mois : trésorerie tendue, plus de 12 mois : sur-provisionnement possible. Le fonds de roulement est le matelas de sécurité.

Le ratio charges / valeur patrimoniale

Charges annuelles / valeur vénale moyenne des lots : moyenne nationale : 3 à 8% selon standing, ratio élevé : charges lourdes pénalisant attractivité, ratio bas : bon entretien ou sous-investissement. Ce ratio intéresse les acheteurs.

Les bonnes pratiques

Quelques conseils pour une gestion saine.

La transparence totale

Communiquez largement : diffusion compte rendu financier trimestriel, accès facile aux justificatifs, explication des écarts budget/réalisé, anticipation des besoins futurs. La confiance passe par la transparence.

La prospective financière

Anticipez sur 5 à 10 ans : gros travaux prévisibles (ravalement, toiture), renouvellement équipements, évolution réglementaire, lissage des charges dans le temps. Un plan pluriannuel évite les chocs budgétaires.

La formation continue

Formez-vous aux évolutions : nouvelles obligations comptables, outils digitaux performants, optimisation fiscale, bonnes pratiques du secteur. Le syndic et le conseil syndical doivent se professionnaliser.